Rossignol

Rossignol

Sur la plaine perlée de fleurs et d’alouettes,

Écoute ce chant qui vole au-dessus des buissons,

Qui berce nos jours et nos nuits à l’unisson.

Jamais un rossignol ne fut l’interprète

D’un récit de voyages en ce coin de France,

Sur cette terre stérile parsemée de cailloux

De cette plaine de Crau délaissée par la Durance ;

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Jamais je n’entendis un couplet aussi doux

que lors de ce printemps au bord de ce fourré :

Une mélodie sans fin, subtil chant occitan

Qu’un musicien fugace lançait de ce bosquet.

Abreuvant mes rêves aux accords apaisants,

La nature ouvrait ses senteurs de thym et de genêt,

Extase de parfums sur mon cœur engourdi,

Ivresse des sens dans mon âme endormie,

Tu réveilles l’amour et écris mes sonnets.

Guy E – mai 2021

Le goéland

Le goéland,

Dans le ciel azuré vogue le voilier blanc.

Il glisse sans bruit au-dessus de l’océan.

Ses ailes déployées, il plane sans effort.

Dessinant, sous les pâles nuages qu’il honore,

Ces amples arabesques savamment tracées

Du bout de ses ailes : c’est une écriture chiffrée,

Défi à la gravité, qui livre les secrets 

Des vents marins et de leurs courants éthérés.

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Immobile dans l’air, il se pose sans battement,

Digne et fier, regarde sur la plage ses habitants :

Prisonniers du sol, ils n’ont pas d’ailes pour voler ;

Puis tend ses bras argentés, par les airs porté,

Regarde d’en haut, se moquant d’un cri railleur.

Il se baigne dans les nuées, libre voltigeur.

Joue avec le soleil, tantôt gris parfois blanc.

Emporté par la brise, où vas-tu goéland ?

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Guy E – avril 2021

Les flamants roses

Les flamants roses

Sur les marais salants, ils livrent leur aubade.

S’éveillent en ’une symphonie colorée. 

Bouquet changeant sur fond de lagune dorée,

Les flamants en mousseline rose paradent.

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Étirement, ils dévoilent leur rituel :

Saluent l’aube d’une gracieuse sérénade.  

Les têtes tournent, une charmante saccade,

Une marche synchrone, rythme leur gestuel.

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Premiers sautillements, quelques essais d’envol

Dévoilent sous leurs ailes, leurs rémiges noires.

Fidèle à un signal, ils quittent leur dortoir

Dans un joli ballet, danse leur farandole.

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Un vol en escadrille au-dessus de Vaccarès  

Entre ciel et sel, un camaïeux bleu blanc rose… 

Sur les eaux du delta, avec souplesse, se pose

Puis ils plongent leur bec, écumant ses richesses..

Guy E – avril 2021

Le Martin pêcheur

Martin pêcheur

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En eau vive, qui est ce pêcheur du matin,

Chasseur affuté, fervent de menu fretin ?

Fugace flèche brillante au bord du bassin,

De cette eau pure en serait-il le riverain ?

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D’un trait irisé, il traverse roseaux et joncs.

Nul besoin de filet pour pêcher le goujon.

Martin pêcheur, il n’est pas un marin pêcheur.

Aux aguets, corail et saphir sont ses couleurs.

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Triomphe de patience, un poisson frétillant-

Aucun besoin d’appâts- s’égare innocemment :

Sur un coup d’aile, il plonge, étincelle bleutée,

Puis émerge des flots, le bec récompensé.

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L’alevin malchanceux vainement se débat. 

La partie ne donne pas lieu à un ébat.

Notre vif compère change déjà de branche,

Prêt à refaire une victime sans revanche. 

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Guy Edus – Mars 2021

Une abeille ne fait pas le printemps

Une abeille ne fait pas le printemps

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Une abeille qui bourdonne ne fait pas le printemps.                 

Mais que penser alors de ce nuage ardent

Qui sort de la ruche et s’envole dans les airs,

À la recherche d’un calice à peine ouvert ?

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Une jolie primevère attend toute embaumée,

Confiante et féconde qu’une abeille charmée

Vienne goûter, toute émue, à ses tendres délices.

Point de doute, la saison est venue sans malice.

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L’abeille, bousculée par un désir pressant,

S’enivre de nectar puis s’envole en peinant.

Alourdie et enrichie de cette poudre d’or, 

De fleur en fleur, rose après rose, elle vole encore.

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L’orage gronde, elle doit sauver son butin :

Tandis que le zéphyr la pousse sur d’autres chemins,

À tire d’ailes, saine et sauve, elle regagne la ruche,

Déposant fièrement son trésor sans embûche.

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Jour après jour, la ruche besogneuse s’alourdit.

Fruit de ce dur labeur, le couvain s’enrichit.

Les alvéoles se remplissent de ce miel ambré

Que nous pourrons à la cuillère déguster.

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Guy EDUS – mars 2021

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La chauve-souris

La chauve souris

Je suis une chauve-souris, un oiseau sans plume
Créature de la nuit, je sors à la pleine lune
Dès le crépuscule, je me glisse hors de ton toit
Belle-de-nuit, c’est l’obscurité que je côtoie

Je virevolte, farandole sous ton réverbère,
À la recherche d’un de ces jolis coléoptères.
Alors que déjà je me crois au firmament
J’effleure et frôle vos têtes innocemment.

Serais-je animée par ces sombres desseins
Injuste renom que me prêtent les humains
À ce bal des vampires,  Serais-je invitée
Emportées par une chorégraphie effrénée.

Je déploie vivement mes ailes abat-jour,
Dissimulée derrière mon masque de velours,
J’ai la dent acérée et l’oreille affutée
J’écume la nuit de tous ces insectes ailés.

À l’aube qui pointe, je me rapproche de ton toit
La lumière du jour n’est pas faite pour moi.
Mes yeux bien inutiles manquent d’expression.
Le ventre rassasié, je me replie dans ma maison.

Guy E – février 2021

le rapace

Le rapace

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Silhouette planante dans un azur bleuté,

Au-dessus des montagnes, silhouette affûtée.

Les airs sont ton royaume, ton règne est souverain.

Le regard acéré, quelle chance a le lapin ?

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Tu as les pattes emplumées, le bec affamé.

Évolution suprême, tu scrutes l’horizon :

Ta vie en dépend, tu te prépares à l’action. 

Grand chasseur, tes quêtes ne sont pas une aumône.

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Aux aguets, tu surveilles, juché sur ce pylône :

Ta proie insouciante est de sortie dans ta cour.

Tu planifies l’attaque et mesures son parcours.

Tes ailes se déploient et dévoilent leur envergure.

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Tu tournoies, ultime danse, c’est la nature !

Tes ailes se sont repliées, 

Tes serres se sont refermées.

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Guy E – février 2021

Le geai

Le geai

À l’heure où les fontaines se figent 

Et que la branche du hêtre craque,

Blessure amère que le froid inflige

Soufflée par une brise démoniaque,

La neige recouvre les chemins du val.

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Mes pas tracent la marque de mon passage.

Simple impression dans ce monde virginal.

Je marche avec moi-même, mon esprit voyage…

Un cri strident retentit, me fait sursauter !

Sentinelle furtive ou apparition soudaine ?

Entre les branches du chêne se cache un geai :

Qui donc a osé pénétrer dans son domaine ?

Son écho résonne encore d’arbre en arbre.

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La forêt se tait, la forêt est prévenue.

Toute vie est suspendue, plus de palabre.

Suis-je une menace, suis-je le bienvenu ?

Que crains-tu gentil geai du fond de ta futaie ?

Serais-je un intrus, ou un voleur de glands ? 

Méfiant, tu restes à proximité de ta haie

Alors que je reprends lentement mon errance.

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Je remarque dans la neige brillante ce saphir bleu,

Que je garderai bien serré au creux de ma main. 

Patiemment ciselée, cette jolie plume bleue

Assurément réchauffera mon cœur chagrin.

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Guy E – Janvier 2021

La revanche du pangolin

La revanche du pangolin

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C’était loin, c’était en Chine, c’était avant,

C’était il y a un an, nous étions insouciants.

Le printemps approchait. La nature s’éveillait.

Le Pangolin mourait, le pangolin se vengeait.

Sa dernière volonté dans son testament :

Léguer à l’humanité généreusement

Cet intrus couronné qui devait nous changer,

Chambarder notre vie, sans avertissement. 

Dès lors, contre toute attente, aussi aisément

Sans visa, il traversait en hâte nos frontières.

Nous ne connaissions pas son âme meurtrière.

Aucune résistance pour repousser son avancée.

Cet envahisseur s’immisçait dans nos foyers.

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Notre armée impuissante se trouva désarmée

Face à cette nouvelle invasion sans armée.

Ultime recours après maintes hésitations,

Le confinement en fut la seule solution :

Total, là où chacun restait sur ses arrières,

Puis partiel, appuyé par des gestes barrières.

Chacun faisait au mieux, plus besoin de casque ;

Quelques humains sceptiques exhibaient leur masque, 

Combattant avec courage contre ce minus

Qu’il fallut bien renommer coronavirus.

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Une contrattaque après une première victoire,

L’issue du combat difficile à concevoir

Nous contraignit, dernière stratégie,

Pour ne plus devoir réglementer nos sorties,

A vivre plein d’espoir, combattre ce mutin,

Se résigner, nous replier sur un vaccin.

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Guy E – janvier 2021

l’acrobate

L’acrobate

Je t’ai vu ce matin, acrobate de l’extrême,

Te balancer dans ce rayon de lumière. 

Funambule, tu défiais la pesanteur.

Te prenais-tu alors pour un oiseau 

Pour ainsi voler de branche en branche ?

Puis, tu descendais dans la clairière ;

En tous sens, tu courais sur la mousse,

Affairé, à la recherche de ton butin.

Était-ce un jeu, cette course éperdue ?

Où as-tu mis tes Louis d’or, bel écureuil ?

Cachés dans une souche à l’automne ?

Tel Barbe Noire, aurais-tu dessiné 

La carte du trésor sur cette feuille de chêne,

Sous le regard complice de l’hiver à venir ?

Espiègle, le vent mutin s’est levé. 

Farceur, le vent moqueur a soufflé

Et la feuille infidèle s’est envolée. 

Plus de témoin, plus de mémoire. 

A qui vas-tu adresser ta requête ?

Oseras-tu nous mendier quelques noix ?

Guy E – janvier 2021

Le Pic épeiche

Le pic épeiche

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Oiseau à damier

Tu joues sur l’échiquier.

Ton bec poignard

N’a aucun égard.

Oiseau à calotte,

Aussi rouge que ta culotte,

Quelle que soit la saison, 

Tu lances ta chanson.

Tu visites les troncs 

Au son de ton klaxon

Ombre insolite,

Tu as le rythme

Dans les plumes.

Tu tapes ton enclume,

Comme de coutume,

Cela fait ta fortune.

Tu danses et tu rapes.

Alors tu tapes, tapes, tapes,

Jusqu’au bout du jour.

Tout en haut de ta tour,

Tu joues de ta musique

Et tu piques, piques, piques,

Dès la fin de la nuit.

Et tout cela me réjouit.

Guy E – janvier 2021

Mon hirondelle

Mon hirondelle

Quel message écris-tu dans cette brise légère ? 

Est-ce pour moi que dans le ciel tu dessines  

Ces élégantes arabesques au bord de la rivière?

Est-ce un message d’amour que j’imagine ?

Celui de ma bien aimée que tu as rencontrée

En volant au-dessus de lointaines contrées ?

Infatigable, tu bats des ailes de l’aurore au couchant,

Te moquant de nos pieds attachés à la terre.

Tu écumes les cieux et nous regardes en volant,

Alors tu descends sur l’étang de ton aile légère,

De la rivière capricieuse, tu suis les méandres.

Avec tes compagnes tu danses cette sarabande.

Rassemblées par dizaines au faîte de mon toit,

Quel conciliabule tiens-tu avec tes semblables?

Parles-tu du beau temps ou de mon émoi,

De ton prochain départ vers des pays plus affables ?

Quand reviendras-tu dans mon ciel petite demoiselle,

Ciseler mes nuages de tes dentelles intemporelles ?

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Guy E – janvier 2021

Araignée

Araignée

Fil après fil, patience d’araignée,

Fil après fil, tu tisses et tu brodes,  

Dans le verger avec méthode.

Dès l’aube, tu tends ton voile.

À l’écorce, tu accroches ton étoile,

Soie ténue, à quoi est-elle retenue ?

Ton instinct se perpétue,

Et dans le silence du petit jour, 

Déjà, tu balises ton parcours.

Ta lyre accordée se perle de rosée,

Labeur de la nuit, cousue de fil blanc.

Arrimé à la branche, ton piège vibrant

A l’approche de la proie joue son arpège.

Funambule, tu maitrises ton manège.

Déjà tu approches, où es-tu arachnide ?

Tu prépares ton venin, petit animal perfide.

Baiser amer, innocente créature,

Déjà, tu en as reçu la mortelle piqûre.

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Guy E- janvier 2021

Le repos du chevreuil

Le repos du chevreuil

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L’heure où la lumière envoie ses derniers rayons,

Le brocard broute enfin quelques frondaisons.

Au loin les chiens s’apaisent, l’ombre de la mort s’éloigne,

Le cor de Vigny s’est tu, le silence en témoigne

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Il franchit les ruisseaux, il gravit les cascades,

À travers les prairies fleuries, léger, il gambade ;

D’un surplomb de rochers, il en fait son repaire,

Puis se pose à l’ombre d’un chêne solitaire.

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La biche le rejoint, c’est la fin du calvaire.

Alors, ils s’enfoncent sans peur ni retenue.

Dans cette forêt profonde, ils s’insinuent.

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Artémis a rejoint Actéon sans impaire.

Le crépuscule les enveloppe ; dormez tranquilles !

Demain, les chiens défaits resteront au chenil.

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Guy E – janvier 2021